Je ne souhaiterai pas bonne fête à ma mère

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Par Rim Khiari

Dimanche, c’est la fête des mères mais moi je ne lui achèterai pas de fleurs. Elle n’aura pas de cadeaux. Je n’irai même pas la voir. Demain c’est la fête des mères mais moi je ne la fêterai pas, parce que même si elle m’a mise au monde, ce n’est pas une mère.

Quand j’avais 5 ans et que j’étais amoureuse de mon camarade de classe, elle m’a traité de perverse et m’a dit que ce que je ressentais était mal.

Quand j’ai eu 12 ans et le visage ingrat et le mal-être que donne l’adolescence, elle m’a dit que j’étais moche alors que toutes les filles de ses copines étaient jolies.

Quand j’avais des 15 et des 16/20 au lycée, ce n’était jamais assez parce que les filles de ses copines faisaient toujours mieux et elle me traitait de paresseuse.

Quand à 16 ans, j’ai rencontré mon premier amour, elle a appelé chez lui et a fait un scandale à ses parents en les menaçant de tout et n’importe quoi. Résultat: on lui a interdit de me voir.

Quand j’ai eu 20 ans, elle m’a dit que je resterais vieille fille parce qu’aucun homme ne voudrait de moi.

Le jour de mon mariage, elle a fait une crise d’hystérie, hurlant et se roulant par terre, jurant qu’elle n’allait pas assister à la cérémonie parce qu’elle s’était disputée avec mon père pour une bricole. C’était MA journée, elle ne pouvait pas accepter ça.

Quand je suis revenue de la clinique avec mon premier bébé dans les bras, épuisée, déboussolée et pleine d’appréhensions, elle n’a rien trouvé de mieux à faire que créer une dispute monstre avec mon mari avec des cris qui ont ameuté le voisinage. Il fallait que l’attention revienne vers elle. Encore.

Quand je décrochais un job intéressant, elle remettait systématiquement mes compétences en doute avec des « je ne veux pas que tu te ridiculises ».

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Et j’ai toujours de trop grosses cuisses, de trop petites fesses, des bourrelets, des cheveux mal coupés, je ne me tiens pas droite, je ne sais pas marcher…

Alors pardonne-moi maman si je ne te souhaite bonne-fête, demain. Parce que tu comprends, c’est une fête pour remercier les mamans pour tout l’amour et la bienveillance qu’elles donnent à leurs enfants. Et toi, tout ce que tu m’as donné c’est le sentiment de n’être jamais assez bien, jamais à la hauteur, indigne d’être aimée.

Je t’ai aimée moi, pourtant. Longtemps. J’ai essayé de te plaire. J’ai fait tout ce que je pouvais mais les jolies et intelligentes filles de tes copines gagnaient toujours.

J’ai fini par abandonner.

Tu comprends pourquoi je n’irai pas te voir demain, maman?

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