J’ai pensé que j’allais mourir
Par Oussema H.
C’était en novembre dernier. Je rentrais d’une soirée. J’allais vite. Une des roues a éclaté et j’ai perdu le contrôle de la voiture. J’ai fait 4 tonneaux avant de tomber du haut d’un pont. C’est très étrange comme sensation. Je voyais la voiture partir dans le décor et je n’avais aucun moyen de l’arrêter mais je ne ressentais aucune peur.
Je ne voyais ni le tableau de bord , ni les airbags qui se gonflaient, ni les vitres qui se brisaient. J’étais dans un petit espace de couleur blanche, dans lequel il n’y avait plus de son ni de notion de gravité, je flottais. Et je ne ressentais absolument rien. C’est comme si soudain, j’étais devenu un simple observateur, je n’étais pas impliqué. J’étais conscient, totalement conscient mais c’est comme si j’étais dans une bulle qui m’isolait de tout, du bruit, des émotions, de la peur. J’attendais simplement le moment de mourir comme on attend un bus ou un train. La seule pensée que j’avais était que j’allais mourir jeune mais c’était une pensée sans aucune émotion, une simple observation.
La voiture a fini par s’immobiliser. J’ai réalisé que je n’étais pas mort. Je n’avais rien. Pas une égratignure. Ce qui est un miracle quand on voit l’état de la voiture. Il m’a fallu quelques jours pour remettre vraiment les pieds dans la réalité. J’avais l’impression d’être dans un no man’s land, de flotter entre les deux mondes.
Les jours qui ont suivi l’accident, j’ai passé beaucoup de temps seul, à réfléchir, à me poser des questions qui ne m’avaient jamais traversé l’esprit avant, des questions existentielles, sur la vie, la mort, sur mes priorités. Pour la première fois, j’ai pris conscience que la mort pouvait arriver n’importe quand. Et je me suis demandé si, au cas où cet accident aurait été fatal, j’aurais été satisfait de la vie que j’avais mené jusque là, s’il y avait des choses que j’aurais du faire et que je n’ai pas fait ou au contraire des choses que j’ai fait et que je n’aurais pas dû.
J’en suis sorti avec une liste et des résolutions dont la plus importante est certainement de pardonner à tous ceux à qui j’en voulais. J’étais fâché avec certaines personnes mais j’ai réalisé que je ne voulais pas mourir en étant en colère contre quelqu’un. J’ai tout fait pour réparer les liens qui s’étaient cassés. Par exemple, j’ai débloqué les ex que j’avais bannies de mon profil Facebook. Je me suis dit que certaines ne voudraient sûrement pas faire la paix avec moi mais au moins, ça ne viendrait pas de moi. Je n’ai plus de rancunes.
J’ai toujours aimé lire mais je pensais que je n’avais pas le temps. Aujourd’hui, je le trouve le temps. Depuis l’accident, il y a 4 mois et demi, j’ai lu 8 livres.
J’ai aussi décidé de vivre tout à fond sans me poser de questions, ou penser au jugement des autres. Toutes mes expériences sont intenses et centrées sur le présent. ça ne me dérange pas de dire « je t’aime » même en connaissant à peine la personne si je le ressens vraiment.
Le côté matériel m’intéresse de moins en moins. J’ai décidé de voyager le plus possible, de connaître les gens, les cultures, les paysages afin de me remplir les yeux de beauté, d’expériences, de magie. Pour que quand la mort arrive, je sois heureux d’avoir vécu.
Binetna est un site féminin collaboratif