Rencontre émouvante avec Aziza Boulabiar
A presque 70 ans, Aziza Boulabiar est étonnante de jeunesse et de fraîcheur. On a l’impression de parler à une jeune fille de 17 ans. Très souriante, d’une sincérité désarmante, elle a gardé le même émerveillement qu’à ses débuts. Et son énergie sur la scène du théâtre de Hammamet pour le festival Juste pour rire est juste incroyable!
Le monde du spectacle, Aziza est tombée dedans quand elle était petite. Sa grande sœur militait contre l’occupation coloniale et pour réveiller les consciences. Elle et ses camarades jouaient des pièces de théâtre qui dénonçaient le colonialisme. C’est donc tout naturellement que elle et son autre sœur se sont orientées vers des études d’art dramatique.
Aziza ne finira même pas la formation. Au bout de quelques mois, elle intègre une troupe théâtrale et plonge dans le bain directement. Ses parents bien que réticents, ne se sont jamais opposés à son choix de carrière.
Son père, conducteur de tramway, touchait à l’époque 30 dinars par mois. Elle en gagnait 40, à à peine 17 ans et il en était très fier. Il disait à tout le monde que sa fille gagnait plus que lui.
« A l’époque, il n’y avait pratiquement pas d’actrices. Pour les pièces, on allait chercher des femmes qui travaillaient dans les bordels. Elles ne savaient ni lire ni écrire et apprenaient les textes par cœur en écoutant d’autres dire les répliques. C’était impressionnant. J’étais de loin la plus jeune. J’ai beaucoup appris d’elles. J’admirais leur aisance et leur assurance. »
Aziza a également un supporter inconditionnel: celui qui allait devenir son mari.
« Je le connais depuis que j’ai ouvert mes yeux sur le monde. On habitait dans la même rue. Quand j’ai commencé à faire du théâtre, il m’a totalement soutenue. Il était très protecteur et m’accompagnait à tous les spectacles. Je l’aimais déjà à ce moment là. Je l’aime toujours autant aujourd’hui. Pour qu’on puisse se marier, ses parents avaient posé comme condition que j’arrête de jouer sur scène. Il n’a jamais accepté et m’a imposée avec mon métier. Il reste mon fan n°1. Aujourd’hui encore, quand je n’obtiens pas un rôle il est plus déçu et frustré que moi. Il est convaincu que sa femme est la plus douée. Sourire »
(On a trouvé ça trop mimi.)
Tout le monde ne réagit pas pareil malheureusement et Aziza a les yeux pleins de larmes quand elle parle de sa meilleure amie de l’époque. Elles étaient inséparables mais quand Aziza a commencé à jouer, la mère de son amie lui a interdit de lui adresser la parole. Elles ont quand même continué à se voir en cachette et un jour la mère les a surprises. Elle a fait un scandale à la jeune fille, ameutant tous les voisins, lui disant des choses ignobles. Aziza a pleuré devant tout le monde et ce souvenir lui fait mal jusqu’à aujourd’hui. Et cette mère, si « scandalisée » n’a pourtant pas hésité à s’enorgueillir du fait qu’elle « connaissait bien » Aziza quand 3 ans plus tard, celle-ci est devenue une star du petit écran.
« J’avais 17 ans. Elle m’a humiliée devant tout le quartier, me traitant comme une moins que rien puis quand je suis devenue célèbre, elle était soudain fière de me connaître. J’ai pardonné mais je n’ai jamais oublié. Cela a fait un trou dans mon cœur. »
Ce parcours a fait d’elle quelqu’un de terriblement humain. Forte et fragile à la fois, elle continue son bonhomme de chemin sans jamais se laisser décourager.
« J’aime ce métier. Je continuerai aussi longtemps que possible. Quand je suis sur scène, je suis portée par une énergie plus grande que toutes les fatigues. Je ne fais pas de sport, je n’ai pas de régime particulier pour me maintenir en forme. Tout ce que j’ai c’est l’amour de ce que je fais. »
Vu le résultat, on ne peut que se souhaiter d’aimer ce qu’on fait pour espérer être à 70 ans, aussi frais que cette « jeune fille ».
Articles liés:
- Weld Moufida au festival Juste pour rire
- Celle qui a fait craquer Nidhal Saadi
- J’ai eu un tête à tête avec weld Moufida
- Rencontre avec Lotfi Abdelli, je craque
- Lotfi Abdelli en toute intimité
- Wajiha, une femme, une actrice et une maman formidable
- Pascal Légitimus veut s’éclater avec les tunisiens
- Programmation et détails du festival Juste pour rire à Hammamet
- Wajiha, une femme, une actrice et une maman formidable
- Pascal Légitimus veut s’éclater avec les tunisiens
Binetna est un site collaboratif féminin
Binetna est un site féminin collaboratif
What's Your Reaction?
Binetna est un média féminin tunisien à impact positif. C'est une interface d'influence positive, qui cherche à aider, soutenir et inspirer les femmes